sábado, 20 de diciembre de 2008

BOMBAY, CHRONIQUE D'UN MASSACRE par Claire Berge et Juli Garzon

Le 26 Novembre dernier commençait, à Bombay, une attaque sans précédent. Grenades, fusils d’assaut AK-47 et bombes disposées dans toute la ville ont engendré une panique parmi les Mumbaikers- habitants de Bombay. La dernière bombe fut trouve le 3 Décembre, une semaine après le début des attaques.

Ceci est le récit de la semaine qui a ému le monde, et ses prémices.


Mars 2007

Huit fidayîn- combattants- sont interceptés sur la route maritime de la ville pakistanaise de Karachi à Bombay. Apres avoir payé un pot-de-vin à la police maritime, ils sont remis en liberté avec un transmetteur placé dans leurs sacs.
Quelques mois plus tard ils sont interpelés au Jammu, grâce aux mouchards, lorsqu’ils pénètrent sur le sol indien pour y commettre un attentat


Février 2008

F.A Ansari est détenu avec les 7 autres fidayîn. Il ne tarde pas à révéler son plan : faire voler en éclats l’édifice de la Bourse, à Bombay.
Dans sa déclaration, il dessine des plans du sud de Bombay avec des références spécifiques à l’Hôtel Trident-Oberoi, et à la Victoria Terminus ou Chhatrapati Shivaji Terminus (CST).


18 septembre

Les services de renseignements indiens interceptent un appel via satellite entre un membre connu de Lashkar-e-Toiba- groupe terroriste basée au Pakistan- et une personne non-identifiée. Cette dernière affirme “L’objectif est un hôtel à coté de la Gateway of India (Porte de l’Inde).


24 septembre

On intercepte une nouvelle conversation qui spécifie que les objectifs sont quatre hôtels de luxe en bordure de mer. Aucune date n’est précisée.


19 novembre

L’Intelligence indienne reçoit un communique, probablement des Etats-Unis, ou l’on évoque un autre appel interceptée par satellite. Le point d’émission est au sud de Karachi, à 4 jours de Bombay. L’appel dit “Le cargo est en route pour Bombay”.


26 de novembre

Vers 20h

Dix jeunes hommes chargés de sacs se dirigent par les ruelles étroites du quartier de Colaba vers la Nariman House, maison de juifs ultra-orthodoxe.
En chemin, ils rencontrent une bande de jeunes du quartier, parmi eux, Sumit Supadia.
Ces derniers les interrogent sur le contenu des sacs, ils répondent que c est du matériel pour leur projet universitaire, ainsi qu’une grande quantité d’eau, car étant étrangers, ils ne peuvent boire l’eau locale.
Comme nous commentera plus tard un serveur de Wich Latte “Certains d’entre eux ont vécu ici quelques mois. Je leur ai délivre des plats. C’est pourquoi les gens du quartier n’ont pas été surpris qu’ils entrent dans ce bâtiment, pourtant réserve aux juifs.”
Des dix hommes, huit ne tardèrent pas à en ressortir. Par paire. Une paire se dirige vers le Léopold Café pour diner. Le duo qui reste dans la maison est composé d’Imran et Nasir.


21:15h

Les deux jeunes finissent leur diner au Léopold, demandent l’addition et la règlent. En sortant, ils se séparent, ils se positionnent aux deux entrées de la salle. Là, ils s’arrêtent, ouvrent leurs sacs, en sortent chacun un fusil automatique AK-47 et ouvrent le feu sur la clientèle a l’intérieur.
Andri, photographe américain, entend les tirs, s’étant rendu compte que ce ne sont pas des pétards, il se refugie près d’un cybercafé à coté du Léopold.
Ils n’ont pas tué tout le monde. Ils demandent aux survivants de s’allonger sur le sol et de montrer leur passeport. Nicole-nom inventé- est anglaise, elle est près des terroristes. Lorsqu’elle brandit son passeport et décline sa nationalité, elle imagine sa mort imminente. Etonnamment, ils lui disent de quitter les lieux. “Nous ne voulons plus de britanniques morts ici.” Elle se met à courir désespérément dans ces vêtements troués des balles qui l‘ont frôlée.
Les deux terroristes finissent par quitter la salle et se dirigent vers l’Hôtel Taj Mahal.
Félix Ambrosa, patron d un cybercafé près du Léopold, voit un des terroristes tirer sur les passants qui courent au milieu de la rue, pas sur ceux qui se cachent. Andri, entre instinctivement dans le cybercafé avec Félix, ce dernier éteint les lumières et demandent à sa dizaine de clients étrangers de rester en silence et cachés dans l’arrière-boutique. Une fois, les terroristes passés, certain qu’il n y en ait pas d’autre, Andri va vers le Léopold. “C’était un bain de sang. J’ai aperçu un chargeur sur le sol. Ca suppose beaucoup de balles.”


21:15h

Quelques clients de l’Hôtel Taj jouissent de cette soirée chaude et paisible près de la piscine, quand soudain une grenade et des coups de feu font éclater la bulle de luxe dans laquelle ils se trouvaient.
Puis les terroristes se dirigent vers le restaurant au rez-de-chaussée de l’hôtel. Là, ils peuvent fermer les portes et prendre des otages. Ils sont quatre, les deux qui viennent du Léopold et deux qui les attendaient a l’intérieur. Leur nom : Javed, Hafeez, Nazir et Shoaib.


21:50h

C’est l’heure de pointe à la CST, la plus grande station de train de Bombay, celle ou transitent le plus de voyageurs dans toute l’Inde.
Mukesh Agrawal, gérant du Re-fresh, un restaurant situé au niveau du quai numéro 13, se prépare à servir les centaines de personnes qu‘il y a dans la gare.
Ismail et Kasab se trouvent au début du quai 13. Ils se regardent, se sourient, ouvrent leur sac : l’un prend un AK-47 et l’autre : une grenade. Il la lance au milieu de la foule. Lorsqu’ elle explose, son compère ouvre le feu sur tout ce qui bouge. Apres avoir tire une deuxième grenade, qui n’explose pas, l’autre se met à mitrailler aussi. M. Agrawal crie à ses clients de se mettre à terre lorsqu’une balle lui perfore l’abdomen. Dans ces minutes de panique, un des terroristes laisse un sac noir et rouge sur le sol. Des mégaphones émane la voix calme de D. Zende priant les voyageurs de gagner les sorties les plus proches.
Les deux terroristes restent un long moment la ou ils ont commencé. On ne leur oppose aucune résistance. Comme le relate Sébastian Da Souza, éditeur photographique du Mumbai Mirror qui photographia les terroristes dans la gare, les policiers seulement armés de lathi ou bâton de bambou fuyaient comme le reste des voyageurs. Même lorsqu’un des terroristes l’aperçoit photographier et lui tire dessus, Da Souza prie un policier de riposter mais ce dernier ne fait rien, paralysé par la peur.
La gare demeure dans un silence absolu tandis que les terroristes la parcourent tranquillement. Une femme s’enfuit tenant son fils de six ans par la main parmi d’autres qui s’échappent de ce jeu de massacre. En courant, elle perd son sang-froid et commence à crier. Un des terroristes la voit, sourit, vise et tire d’abord sur l’enfant puis sur elle.
Le plan des terroristes était de siéger et utiliser des otages comme protection, mais la résistance policière est minime et les gens ont fuit.
Suddam Pandarkar est un des policiers de service dans le commissariat situé a l’intérieur de la gare. Après quelques instants de confusion, leur supérieur leur demande de s’opposer aux terroristes. Depuis le quai numéro 6 des trains locaux, il aperçoit les terroristes. Il tire trois balles de son petit pistolet vétuste, ce qui attire l’attention des ennemis. D’une rafale de leur fusil automatique ils l’atteignent à la poitrine. Son souvenir suivant est à son réveil a l’hôpital. S. Pandarkar fut un des trois seuls policiers à ouvrir le feu sur les terroristes.
Après 25 minutes sans résistance Ismail et Kasab décident de sortir de la gare.


22:00h

Sans que rien n’est perturbé l’ambiance de l’hôtel luxueux Trident-Oberoi (deux hôtels unis par une passerelle) un feu se déclare dans la réception du Trident et on tire indistinctement dans celle de l’hôtel Oberoi.
Puis les deux terroristes se dirigent vers le restaurant Tiffin de l’Oberoi, ou tel que dans l’hôtel Taj, ils pourront fermer les portes et faire des otages. Une fois à l’intérieur, Rehman et Fahadullah ordonnent aux serveurs de mettre le feu au restaurant avec tout le monde dedans. Les deux serveurs armés de boites d’allumettes obéissent et tentent de mettre le feu aux rideaux. Tandis qu’une femme enceinte de 8 mois leur demande de l’épargner et reçoit une rafale de balles en réponse. La terreur est palpable dans l’air. Tellement que le premier serveur ne parvient pas à enflammer les allumettes. Il est, lui aussi, tué. L’autre serveur, sachant qu’il va mourir aussi, saute par la fenêtre. Il sera sauvé, tout comme un serveur du Taj, qui s’enfuit, lui aussi, par la fenêtre.

A 22h, également, dans le restaurant Souk situé sur le toit-terrasse de la Taj Tower de l’hôtel Taj Mahal. Faisul participe à un diner d’affaires. En tant que garde du corps - il est chargé de la sécurité de la sélection sud-africaine de cricket- il se rend compte que quelque chose ne va pas. Trop d’appels, quasi-simultanés, reçus par les clients de la salle, airs inquiets et questions aux tables voisines ainsi que la nervosité évidente du manager du restaurant, le convainquent que quelque chose tourne mal.
En entendant les coups de feu, il regarde d’en haut, des larges baies vitrées, les rues qui cernent l’hôtel Taj et sa tour. Il ne voit rien d’anormal. Il se présente au manager qui lui confie que l’hôtel semble être attaqué. Faisul prend contrôle de la situation dans le restaurant. Après avoir demandé aux clients de rester calmes, Faisul ordonne que les portes soient verrouillées. Après quelques appels, le manager confirme l’attaque terroriste. Faisul enjoint la soixantaine de clients de rejoindre les cuisines. Et aidé du personnel du restaurant, il place le plus silencieusement possible des meubles contre les portes afin de les condamner. De là, ils passent à une salle de conférence ou il découvre une soixantaine d’autres personnes. En passant dans la cuisine, Faisul et le personnel s’arment de tous les couteaux qu’ils trouvent. Faisul demande à un membre de la sécurité de l’hôtel de voir si le chemin de fuite, l’escalier de secours, est sécurisé. Puis ils éteignent les lumières et restent en silence.

Vers 22h également, a la Nariman House, la gouvernante -nom non-révélé- du rabbin Gavriel Holtzberg ouvre la porte de sa chambre lorsqu’elle entend des cris dans la maison. Elle voit deux hommes armés. Elle referme la porte sans faire de bruit et se tapit dans un coin de la chambre. Elle entend des coups de feu. On pense que c’est déjà là que meurent le rabbin, sa femme et deux hôtes juifs. Les seuls survivants sont leur bébé de 2 ans et la gouvernante cachée dans sa chambre.
Puis Imran et Nasir tirent des fenêtres, tuant un des jeunes qui avait questionné le contenu des sacs a leur arrivée. Ils lancent une grenade pour faire exploser la station service qui se trouve juste à coté. Heureusement pour le voisinage, un des plus peuplés de Colaba, ils ne parviennent qu’à détruire le mur qui borde la station service.


22:15h

Une bombe explose dans un taxi à Vile Parle, en banlieue de Bombay, à 30 kilomètres de Colaba.


22:36h

Un deuxième taxi explose à Wadi Bunder, à 40 kilomètres de Colaba.


22:45h

Les terroristes décident de monter tous les otages du restaurant de l’hôtel Trident-Oberoi au 18e étage. Parmi eux se trouve Apoorva Parikh avec ses amis Ashok Kapoor , un des patrons de la florissante Yes Bank et Suresh Parekh. Une fois arrivés au 18e étage, la quantité d’otages ne permet pas aux terroristes de les maintenir tous là. Certains doivent redescendre au 17e étage. Apoorva reste au 18e avec ses deux amis, le reste des otages et un terroriste, l’autre est descendu avec les otages qui ne tenaient pas au 18e. Après quelques minutes et des ordres échangés entre les terroristes, ils ouvrent le feu sur les otages des deux étages, les tuant presque tous. Apoorva est l’unique chanceux que les balles n’ont pas touché, il tombe sur le sol, ses deux amis morts sur lui.
L’objectif des terroristes était de tuer 5000 personnes au total, dans les différentes attaques.


23:00h

Ismail et Kasab décident de quitter la gare Victoria. Sur leur passage, ils tirent sur tout ce qui bouge.
A moins de 400 mètres de la gare, à coté de l’hôpital Cama, ils rencontrent Thakur Budha Waghela, agent de maintenance de nuit a l’hôpital Albless. Il termine son diner avant d’aller travailler. Les deux terroristes lui demandent de l’’eau. Il leur donne puis ils le tuent sous les yeux de son fils de six ans. Ensuite ils se dirigent vers l’hôpital Cama, spécialisé dans les soins de maternité ou Nasrim Shaikh est en travail. Lorsque les docteurs qui l’assistent entendent les premiers coups de feu, ils poussent la tête du bébé, qui émergeait déjà, à l’intérieur du ventre de sa mère. Elle hurle de douleur, les médecins lui injectent un calmant pour qu’elle s’endorme, ils éteignent les lumières de la salle de travail et verrouillent la porte de l’intérieur. Après quelques minutes, les terroristes passent à cet étage et tentent d’ouvrir la porte. Etant fermée, ils quittent l’étage. Immédiatement après, les médecins réactivent l’opération et réussissent à sauver la vie du nouveau-né et de sa mère. Les six morts enregistrés a l’hôpital Cama sont des policiers qui les poursuivaient. Les témoins de l’hôpital affirment que les terroristes tiraient seulement en l’air à l’intérieur. Ils ne menacèrent ni patient ni personnel de l’hôpital.
Hemant Karkare, chef de la Brigade Antiterroriste de Bombay apprend par la radio de sa voiture la localisation des terroristes, et s’y dirige maintenant avec trois de ses agents : Ashok Kamte, Vijay Salaskar et Arun Jadhav. Une fois arrivés, on leur indique la direction prise par Ismail et Kasab. En chemin, ils trouvent deux corps sans vie au bord de la route. Laissant l’hôpital Albless sur leur gauche, ils tournent à gauche, suivant l’unique voie possible en voiture. C’est une rue avec l’hôpital Albless à nouveau sur la gauche et des buissons sur la droite qui cernent les bâtiments donnant sur la rue. Une embuscade d’Ismail et Kasab, deux jeunes de 21 ans, met un terme à la vie de Karkare, le chef de l’ATS, la plus importante brigade antiterroriste indienne et à deux de ses collègues. Les deux terroristes sortent les corps de Karkare, Kamte et Salaskar de la voiture en riant sur le fait qu’ils portaient des gilets-par-balles. Mais ils laissent Arun Jadhav à l’intérieur, peut-être a cause de sa corpulence ou de sa position à l’arrière de la voiture, ils auraient perdu trop de temps. Arun Jadhav est le seul survivant des quatre occupants de la voiture.
Ismail et Kasab prennent la fuite avec la voiture ce qui leur permet de suivre tous les communiqués de la police à la radio. Ils sortent de la rue Badruddin Tayabi et tournent à droite sur la Mahapalika Marg. En passant devant le Cinéma Metro, ils tirent sur des gens qui attendent le début de la séance nocturne. Tout au long de leur trajet, ils tirent au hasard dans les rues étrangement semi-désertes du sud de Bombay. Tandis qu’à l’arrière de la voiture, Arun Jadhav, gravement blessé, peut à peine bouger.
La voiture se dirige a grande vitesse vers Colaba, comme s’ils voulaient rejoindre l’hôtel Taj ou la Nariman House, très proche l’un de l’autre. En chemin, ils rencontrent un contrôle de police au milieu de la route. Du barrage, les policiers voient un van de patrouille qui s’approche à vive allure . Ils semblent inquiets. C’est un véhicule de patrouille, mais il a un comportement étrange. Aucun agent ne réagit. Du van émanent deux hommes des fenêtres avant qui commencent à tirer. La camera qui filmait tombe à terre et les terroristes passent le contrôle, non sans crever un pneu.
Les terroristes entendent à la radio que leur voiture a été identifiée. Ils s’arrêtent à hauteur d’une Skoda bleue, tuent son occupant et s’enfuient avec. C’est la qu’Arun Jadhav fournit des informations via la radio : le nouveau véhicule des terroristes, la direction qu’ils ont pris et la mort de Karkare. Cette dernière nouvelle rend le corps policier furieux. Finalement, Ismail et Kasab sont interceptés quelques minutes plus tard sur Chowpatthi Beach. Ismail meurt sous les balles de la police, tandis que Kasab, gravement blessé, est amené à l’hôpital et arrêté.


27 novembre
00 :00h
L’ampleur des évènements montre au gouvernement indien qu’ils ne font pas face à une simple attaque terroriste mais à un ensemble d’attaque sur toute la ville de Bombay. On active les plans d’alerte maximale et on appelle les corps de Marines, spécialisés dans les opérations de risque élevé en haute mer, et le corps d’élite de la Garde de Sécurité Nationale, le corps le plus entrainé d’Inde pour répondre à tout type de menace.

02:00 - 10 :00h
Les Marines entrent en action à l’hôtel Taj Mahal, à l’hôtel Trident-Oberoi et à la Nariman House à deux heures du matin.
Tandis que, Sunil Yadhav, membre de la Garde de Sécurité Nationale, continue à attendre a Delhi, comme ces deux dernières heures, la venue d’un avion qui doit le transporter, lui, ses 150 compagnons et leur matériel jusqu’ à Bombay.
Plusieurs clients de l’hôtel Taj Mahal cherchent des solutions pour s’échapper du bâtiment, impossible d’être totalement sous contrôle de seulement 4 terroristes. Deepak Kuntawala confectionne une longue corde avec les rideaux de sa chambre, par laquelle nombreux s’échapperont. D’abord les femmes et les enfants. Puis, les hommes. L’avant-dernier est son père qui tombe et se casse une jambe lorsque les rideaux se rompent . Deepak Kuntawala descend comme il peut avec le reste des rideaux déchirés.

A l’hôtel Trident Oberoi, Apoorva Parikh est toujours en vie au 18e étage, il entend les terroristes revenir. Il fait le mort, et sent la lumière d’une camera qu’il le filme lui et le reste des victimes. Ils sont filmés par les terroristes ou du moins il le croit. Quand Rehman et Fahadullah s’en vont, un de ses amis, gravement blessé, lui demande un peu d’espace pour mieux respirer. Il y concède, un peu après son ami meurt. Les terroristes reviennent après un moment, ils sont tout proche et il les entend dire : “Celui-là a bougé. Il n’était pas la avant. On va vérifier.” Il sait qu’ils se référent à lui. Lorsqu’il est sur qu’ils sont partis, Apoorva Parikh quitte l’étage pour monter jusqu’à la salle de l’air conditionné.

Dans la Taj Tower, les 120 personnes que Faisul se charge de protéger, sont toujours enfermés dans la salle de conférence. Apres avoir eu confirmation que l’escalier de secours est sûr, Faisul ordonne à tous d’enlever leurs chaussures, d’éteindre leur portable et les prie de garder un silence total. Après une heure de souffrance, descendant les escaliers aux sons des tirs et des explosions, Faisul parvient à évacuer tout le monde sain et sauf. Il est trois heures du matin et, le fait d’être dans la moderne Taj Tower et non dans l’Héritage, la partie ancienne ou agissent les terroristes, leur a sauvé la vie.
Dans les trois premières heures de l’opération, les Marines réussissent à libérer une centaine de personnes de l’Héritage. Mais à 05h, les terroristes découvrent la voie de secours des otages par le lobby et y lancent une grenade. Les opérations de secours s’interrompent jusqu’ a 07h. Durant les trois heures suivantes, les Marines libèreront une centaine d’otages supplémentaires.
C’est environ à ce moment que Sunil, membre de la Garde de Sécurité Nationale, entre dans l’avion qui l’emmène, lui ses compagnons et leur matériel, à Bombay.

Aux environs de neuf heures du matin, la gouvernante de la Nariman House entend les pleurs incessants du bébé, et après un moment sans détonations, elle décide d’aller le chercher. Après l’avoir trouvé et calmé, elle s’échappe avec lui de la maison. Dans sa fuite, elle aperçoit quatre corps sans vie sur le sol. Les terroristes ne se rendent pas compte de son départ et son témoignage fournira de précieux renseignements à la Garde de Sécurité Nationale sur ce qui se passe à l’intérieur.

A 10h du matin, la Garde de Sécurité Nationale entre enfin en action, à l’hôtel Taj Mahal, à l’hôtel Trident-Oberoi et à la Nariman House.

Sunil est assigné au Taj. Sa mission est de secourir le plus de gens possible. Ce ne sont pas des otages, mais plutôt des gens cachés, la majorité dans leur chambre. Ce sera un travail difficile pour Sunil, mais il est entrainé pour ca. Comme le surnom de la Garde de Sécurité Nationale l’indique “Black cats” (Chats noirs) : leurs vêtements noirs, leur capacité à se déplacer dans les zones de conflit sans articuler un mot, sans faire de bruit qui trahirait leur position, équipés des dernières armes et entrainés à résister à la douleur, rend ce corps idéal pour la situation.
Sunil commence son travail au 6e étage de l’hôtel pour ensuite descendre d’étage en étage. Sa mission concrète est de vérifier, chambre par chambre, l’existence d’hôtes. Chaque hôte qu’il trouvera sera amené à la “Central Place”, un vestibule commun à chaque étage duquel émanent les couloirs menant aux chambres. Une fois la, il donnera l’hôte à un autre commando, chargé de le faire sortir du bâtiment. Il devra alors vérifier une autre chambre, une par une. Et ainsi de suite pour les 500 chambres de l’hôtel.
A l’hôtel Trident-Oberoi, la Garde de Sécurité Nationale entre dans le bâtiment par le toit-terrasse grâce à quelques hélicoptères. Leur mission et leur forme d’action sera la même que dans l’hôtel Taj Mahal.



10 :00 - 00 :00h
A midi, devant le restaurant Gokul, situé à coté de l’hôtel Taj, une des milliers de personnes venues suivre les faits de près, demande à la police à qui sont ces deux sacs visiblement abandonnés. On appelle la brigade anti-bombe pour vérifier. A la surprise et panique générale, les sacs contiennent huit kilos d’explosifs RDX chacun, suffisamment pour provoquer un massacre parmi la foule. L’alerte est lancée et l’on investit les abords de l’hôtel Trident-Oberoi et ceux de la Nariman House. A la surprise de la police, on trouve deux sacs similaires devant l’hôtel Trident-Oberoi, mais rien aux alentours de la Nariman House.
La lecture de ce fait mène à une conclusion claire. Si les sacs sont dehors et les terroristes à l’intérieur, cela signifie qu’il y a d’autres terroristes a l’extérieur.
Ce fait a été confirmé par l’unique terroriste détenu, qui affirme qu’ils étaient quinze sur le bateau, pas dix.
Il est 15h30 et cela fait 5 heures que Sunil libère des otages. Il ne sait pas combien, les circonstances ne lui permettent pas de tenir le compte. De plus, comme ils sont entrainés à ne pas parler, une fois a l’intérieur, il ne peut communiquer avec personne, excepté ses compagnons, par signes, ils n’ont pas d’inter communicateurs. Cela rend impossible de savoir combien d’otages ont été libéré, s’il en reste à l’intérieur et si les terroristes sont toujours en vie, car il ne peut communiquer qu’avec les commandos se trouvant à ses cotés.
Sunil continue son travail risqué. Il arrive a la porte d’une chambre. Comme à tous les étages, il y a beaucoup de fumée et il fait sombre, en dépit des grands ventilateurs que la Garde de Sécurité Nationale a installés pour éventer la fumée et l’odeur des corps en décomposition. On ne voit pratiquement rien et il ne dispose d’aucun plan du bâtiment. Le guide de l’hôtel qu’ils ont amenés, s’est enfuit, terrorisé par les événements.
Il frappe à la porte de cette chambre avec précaution, s’attendant à de possibles tirs des terroristes. Aucune réponse. Il s’identifie comme police, mais, comme l’expérience l’a montré, s’il y a un otage à l’intérieur, il ne dira rien croyant que c’est un terroriste qui frappe à sa porte. De plus, il est certain qu’ils ont barricadé la porte avec des meubles pour rendre difficile l’accès aux terroristes.
Sunil avertit qu’il va faire sauter la porte. L’otage doit se protéger, bien que l’explosion soit minime. Une fois à l’intérieur, après avoir démoli la barricade érigé par l’hôte, Sunil le cherche. Il découvre un homme tapi dans un coin de la chambre, mort de peur devant cet homme en noir, avec un passe-montagne noir et armé d’un fusil qui vient d’entrer. Sunil le prend dans ses bras, l’apaise et lui fait comprendre qu’il est son sauveteur et une fois l’hôte rasséréné, il lui donne de l’eau. L’eau calme, toujours.
Une fois l’otage tranquillisé, Sunil lui explique qu’il va l’emmener au vestibule centrale, d’où un autre commando le fera sortir du bâtiment. Ils marchent avec prudence dans les couloirs. En voyant la situation qui l’entoure, l’hôte entre à nouveau dans un état de panique. Arrivés au point de réunion avec les autres commandos, Sunil reste à ses cotés un peu plus pour le calmer. De sa position, il ne peut voir à plus d’un mètre, car les couloirs deviennent de sombres et larges tunnels emplis de fumée. Soudain, une grenade explose à coté des otages secourus. Tous paniquent et suit un moment de grande confusion. Les terroristes tirent sur eux, la Garde de Sécurité Nationale riposte. Mais, comme nous a explique Sunil, ils ne savaient pas ou tirer, ils ne savaient pas d’où venaient les tirs. Sunil ressent quelque chose au niveau de sa fesse gauche mais il continue à tirer contre les terroristes. Lorsque la situation est sous contrôle, les commandos libèrent les otages et Sunil se dirigent vers une autre chambre pour chercher d’autres hôtes.
Ce n’est qu’a 16h30 que Sunil commence à ressentir une chaleur excessive dans la hanche et une certaine sensation de vertiges : une balle a pénétré sa fesse gauche et est ressortie par la droite. Un commando se charge de le sortir de l’hôtel. Selon lui, il a pu continuer grâce a l’entrainement pour supporter la douleur et l’équipement spécial dont dispose la Garde de Sécurité Nationale.

Dans l’hôtel Trident-Oberoi, c’est une situation similaire qui se joue. A 14h30, ils parviennent à libérer quelques otages. Comme si les terroristes suivaient les événements à la télévision, de 14h30 à 15h, comme s’ils se vengeaient de la libération des otages, ils lancent cinq grenades qui obligent l’arrêt des opérations de secours. Apres ces explosions, on décide d’envoyer plus de commandos à l’intérieur.

Durant toute la journée Imran et Nasir, les terroristes de la Nariman House, opposent une résistance brutale à la Garde de Sécurité Nationale. Bien que ce bâtiment n’ait que quatre étages, ils ne parviennent à aucune avancée. Les terroristes, avec des couvertures aux fenêtres, changent constamment de position pour tirer. Ce qui inquiète les commandos, qui ne savent pas si les deux terroristes vus par la gouvernante sont les seuls de la maison.

28 novembre
00 :00 - 20 :00h
A une heure du matin, quarante otages sont libérés de l’hôtel Trident-Oberoi. L’opération progresse, l’offensive contre les terroristes continue.
Apoorva Parikh est toujours caché dans la salle d’air conditionné. Il a survécu grâce a l’eau de l’air conditionné. Vers huit heures du matin, on entend à la radio d’un policier à l’extérieur de l’hôtel quelqu’un dire “Au 16e étage, il n’y a personne. On continue au dessus”. Ce n’est qu’aux environs de 9h30 qu’un commando parvient au 19e étage, ou se situe la salle d’air conditionné. Lorsque la Garde de Sécurité Nationale frappe à sa porte et s’identifie, Apoorva Parikh comprend qu’il lui reste des chances de s’en sortir. Finalement à 10h commence une libération massive d’otages. Les terroristes sont déjà morts, mais la libération de 93 personnes s’étend jusqu’à 15h30. On ne sait pas si c’est dues à des complications à l’intérieur de l’hôtel, ou l’état dans lequel se trouve les otages ou parce qu’à l’extérieur se trouve une marée de journalistes, surtout indiens, désireux d’obtenir des images des otages. Ainsi, a chaque otage libéré, un essaim de cameras se jette sur lui, après 36 heures enfermé dans des circonstances terrifiantes, il est assailli par les objectifs.
A 15h30, l’opération de sauvetage est déclarée terminée, après 41 heures de souffrance.

A la Nariman House, dans la matinée, trente commandos de la Garde de Sécurité Nationale sont déposés sur le toit par un hélicoptère. Mais Imran et Nasir connaissent la maison à la perfection et disposent d’un grand arsenal de munitions et grenades. Commence une lutte acharnée à l’intérieur, avec 25 explosions enregistrées, probablement des deux camps.
A 18h40, Andri, le photographe américain, est aux environs de la Nariman House. Le bruit court que les commandos ont tués les terroristes. Les gens commencent à sauter les périmètres de sécurité autour de la maison. Andri nous commente “Je n’aime pas les foules indiennes. Et encore moins celle-là, juste à coté de la zone de conflit. Et les gens paraissaient vraiment en colère. C’est pourquoi je suis resté en marge.” La horde se rapproche aux cris de “Vive l’Inde, Mort au Pakistan” car le terroristes arrêté vient de ce pays. Quand ils sont déjà tout proches de la maison, ils entendent des coups de feu à l’intérieur. La foule déjà au pied de l’immeuble se disperse à la débandade qui aurait pu couter la vie de plus d’un.
Finalement, l’opération est jugée terminée à 20h, après 46 heures de siège.

Toutes les opérations réalisées dans le Taj Mahal Hôtel furent longues et difficiles, c’est le seul lieu ou quatre terroristes agissent, non deux comme dans les autres sites. De plus, grâce aux confessions de Kasab, on sait que les terroristes avaient loués des chambres quelques jours auparavant, ou ils ont laissé une grande quantité d’armes.
A 15h30, sept otages sont libérés, mais le chef du commando de Sunil meurt dans les affrontements. On estime à une centaine le nombre d’otages resté à l’intérieur. Entre 16h45 et 17h15 on entend de nombreuses explosions de grenades et de multiples détonations. La Garde de Sécurité Nationale prend contrôle du rez-de-chaussée. La lutte continue de façon violente et ininterrompue jusqu’à 19h. Selon les commandos, les terroristes ont une préparation stratégique et militaire exceptionnelle, équivalente à la leur. Ils changent constamment de tactiques militaires et de lieux, ils font mettre le feu aux chambres par les otages. Lorsque la Garde de Sécurité Nationale arrive croyant avoir affaire à un terroriste, ces derniers sont cachés ailleurs d’où ils leur tirent dessus.
A 19h, une accalmie dans la bataille puis ca recommence de façon sporadique à partir de 21h. Fatigués et n’ayant rien mange de la journée, nous décidons de faire une trêve nous aussi et partons manger quelque chose. Quand nous revenons, vers 21h40, une étrange vision s’offre à nous. Tous les cameraman, les photographes en première ligne sont à plat ventre à terre. Un collègue nous explique comment, juste après notre départ, un tir provenant de l’hôtel Taj a blessé un journaliste. C’est pourquoi tout le monde est allongé sur le sol avec l’interdiction absolue d’utiliser flashes et lampes qui indiqueraient aux terroristes ou se trouve la presse. Les terroristes se sont retranchés au premier étage, juste au coin de l’hôtel qui donne sur là ou nous sommes.
A 22h30, on entend à nouveau des détonations. Les commandos essayent d’acculer les deux derniers terroristes qui restent dans l’hôtel, dans l’angle mentionné, pour l’attaque finale.
A trois heures du matin, commence la grande offensive. Les explosions et les détonations s’entendent de partout. Aux environs de six heures, un haut grade de la Garde de Sécurité Nationale confirme qu’un terroriste est mort et qu’il n’en reste plus qu’un, gravement blessé, juste dans l’angle opposé.
Vers 7h30, le terroriste ne peut plus se mouvoir due à ses multiples blessures. Les commandos sont surpris de la résistance qu’il leur oppose.
Finalement à 8h, après quelques 60 heures de siège, la Garde de Sécurité Nationale tire indistinctement à l’endroit ou le dernier terroriste se cache, laissant son corps difficilement identifiable.

Le cauchemar est décrété terminé, enfin.

Les jours suivants submergeront Bombay de tristesse d’abord, puis de colère contre le Pakistan ; et finalement viendra l’indignation et la colère contre les politiciens que l’on traite de corrompus et d’ineptes à gouverner.
Tous ces sentiments étaient visibles dans la manifestation d’hommage aux victimes du 30 Novembre sur Marine Drive ainsi qu’à la manifestation massive du 3 décembre devant l’hôtel Taj Mahal et la Porte de l’Inde.

NOTES :
Le 3 décembre, une semaine après le début des attentats, à 18h, heure a laquelle commence la manifestation, est découvert à la gare Victoria une bombe. Elle était dans un local, parmi les bagages abandonnés par les voyageurs lors de l’attaque. Comme Kasab confiera durant les interrogatoires de la police, que toutes les bombes déposées aux abords des hôtels et à la gare devaient servir à créer la panique dans laquelle les terroristes pensaient s’échapper pour plus tard se regrouper à la Nariman House et de là aller ensemble au port. Ils auraient pris un bateau pour rejoindre une autre embarcation qui les attendrait au large pour les ramener au Pakistan. Ainsi la mission avaient été promue aux jeunes comme une opération non-suicide. Etonnamment, aucune des bombes - qui devaient être utilisées comme moyen d’évasion et qui étaient toutes programmées a la même heure- n’a explosée.
Le budget du corps de sécurité chargée de protéger le Premier Ministre et les membres de la famille Gandhi- dynastie initiée par Nehru- est de 30 millions d’euros. Le budget de la Garde de Sécurité Nationale, chargée de protéger les quelques 1.200 millions d’indiens est seulement de vingt-six millions d’euros.

1 comentario:

Unknown dijo...

Cool ! un message en français ! merci Claire !
Espero que estais bien. Les mando un gran abrazo desde Francia para las fiestas del fin del ano! Todavia os quedais en India? Si regresan en Europa, estais bienvenidos en Montreuil, cerca de Paris, donde Sam y yo vivimos ahora! Habeis visto que Stephanie a publicado un libro sobre su viaje en India (desde Janadesh y los 6 meses que siguieron) ?
Hasta pronto, que os vaya bien !
Anais